Annie Vidal
Discours du Premier Ministre du 28 avril 2020 - Ce qu'il faut retenir

Introduction à la stratégie nationale de déconfinement
I. Le constat médical
Nous allons devoir vivre avec le virus et apprendre à nous en protéger tant qu’il n’y a pas de vaccin, pas de traitement, pas d’immunité de groupe. Le virus va continuer de circuler parmi nous. On ne peut pas fonder la vie des Français sur des hypothèses incertaines. Le confinement a été efficace pour tenir malgré une pression importante. Notre système hospitalier a tenu au prix d’une fatigue, d’une consommation de médicaments de réanimation jamais constatée, et au prix d’une déprogrammation des opérations non nécessaires à court terme.
Le risque d’une seconde vague doit être pris au sérieux et il impose de procéder avec prudence. Il s’agit d’agir avec progressivité.
La circulation du virus n’est pas uniforme dans les territoires et crée des différences. Celles-ci doivent être prises en compte. Il n’est pas possible d’appliquer le même schéma pour des situations différentes. Par ailleurs, cela doit permettre de laisser aux autorités locales la possibilité d’adapter la stratégie nationale selon les circonstances. Un travail de concertation va être mis en place dans les prochains jours pour permettre de mettre en place et adapter le plan.
A partir du 11 mai, trois axes : protéger, tester, isoler
Protéger
Il est impératif que chacun adopte les comportements pour éviter la contamination. Le respect des gestes barrières et de la distanciation sociale ainsi que le port du masque dans les conditions prévues par le plan national.
Port du masque : lorsque la crise a commencé, il y avait un stock important permettant de tenir 20 semaines. A l’apparition du virus en Chine et en Italie, l’importation est devenue impossible et la consommation a augmenté. Il a fallu gérer un risque de pénurie. Nous avons pris trois décisions :
o augmenter la production (Nous avons atteint aujourd'hui 5 fois la production initiale)
o réserver le stock existant au personnel hospitalier et donc refuser de le distribuer à d’autres
o produire des masques en tissu pour compléter l’offre et ne pas dépendre de l’importation.
Nous recevons presque 100 millions de masques chaque semaine. Nous soutiendrons les collectivités en prenant en charge 50% du coût des masques selon un prix de référence. Par ailleurs, grâce à la réouverture des ateliers pour produire des masques en tissu, il y aura assez de masques le 11 mai.
Les Français pourront se procurer des masques grand public dans tous les commerces.
Nous nous appuyons sur les maires et les préfets. Les entreprises sont également invitées à équiper leurs salariés pour la reprise.
Une plateforme de e-commerce distribuera les masques grand public à partir de la fin avril. Les préfets auront une enveloppe. Les établissements d'éducation, les collèges auront des masques aussi. Les particuliers sont invités à faire des masques.
5 millions de masques par semaines seront distribués via les CCAS et le milieu associatif.
Tester
A la sortie du confinement nous allons massifier les tests. Notre objectif est de 700 000 tests virologiques par semaine. Ce chiffre s'appuie sur les estimations du conseil scientifique : sont prévus l'apparition de 1000 à 3000 cas par jour. Cela impliquera de tester entre 20 et 25 personnes autour de chaque personne contaminée grâce à la mobilisation des laboratoires publics et privés pour permettre de créer des accès de proximité. Ces tests seront remboursés à 100% par l’assurance maladie.
Il y aura une mobilisation des professionnels de santé libéraux qui constitueront la première ligne dans la recherche des cas contacts. Ils seront accompagnés.
Les équipes de l’assurance maladie seront en appuis. Des brigades par département seront chargées de remonter les cas contacts et d'assurer le suivi des tests, ainsi que l’application de la doctrine nationale.
Isoler
L’objectif final est de permettre d’isoler les porteurs pour casser la chaine de transmission.
Une fois une personne testée positive, on testera toutes les personnes qui ont eu un contact rapproché avec les personnes, symptomatiques ou non. Ces contacts seront appelés à s'isoler. Ce sera contrôlé par des brigades mises en place dans chaque département qui vérifieront notamment que les tests des cas contacts ont bien été réalisés.
Cet isolement signifie la prise de mesures de précaution collectives qui doivent être suivies en appuis sur la base du civisme de chacun.
Les préfets et les collectivités vont définir avec les acteurs associatifs, les professionnels de santé, le plan d’accompagnement des personnes positives. Celles-ci qui pourront choisir de se confiner chez elles avec les membres du foyer ou dans un lieu mis à disposition (ex : hôtels réquisitionnés).
Les outils numériques seront forcément complémentaires (application stop covid notamment). Les dispositifs exposés précédemment ont des faiblesses, notamment l'impossibilité de reconstituer les chaines d’exposition, tout particulièrement en milieu urbain.
Il ne faut pas laisser repartir l’épidémie après le 11 mai. Si le confinement se relâche d’ici cette date, et qu'il apparaît que plus de cas que prévus apparaissent, ou que l’on ne parvient pas à reconstituer les chaînes, nous ne déconfinerons pas le 11 mai ou alors, plus sévèrement. Ces incertitudes doivent inciter à la plus grande discipline et éviter les risques de relâchement. Si tout est prêt le 11 mai, une phase nouvelle ouvrira jusqu’au 2 juin pour apprécier les évolutions. Puis nouvelle phase ouvrira jusqu’à l’été.
Déconfinement territorial selon le niveau épidémique de chaque département : des indicateurs seront définis le 7 mai pour définir le 11 mai quel sera le plan de circulation applicable selon les départements. A partir de jeudi 7 mai : une carte département par département sera rendue publique pour définir et préparer les modalités de circulation. On saura le 7 mai quels départements seront en zone ROUGE de circulation limitée ou VERTE circulation plus libre.
II. L’organisation de la vie quotidienne des français
a. ECOLE
C’est un enjeu prioritaire du plan de déconfinement et un impératif de justice sociale notamment. Le retour des enfants dans les établissements scolaires est un impératif pédagogique et de justice sociale, en particulier pour ceux qui ont des difficultés à suivre l’enseignement à distance. Ce retour doit être concilié avec les objectifs de santé publique.
Réouverture le 11 mai sur la base du volontariat pour maternelles et primaires. Le 18 mai seulement dans les départements où la circulation du virus est très faible, dans les collèges, en commençant par la 6ème et la 5ème. Fin mai, on décidera d'une possible réouverture des lycées début juin.
Pas plus de 15 élèves par classe, distribution de gel hydro alcoolique, gestes barrières, masques pour les enseignants. Pour les enfants : masque prohibé pour les maternelles, pas recommandé pour l'élémentaire (masques pédiatriques pour les cas particuliers), masques fournis pour les collégiens qui n'auraient pas pu s'en procurer (il sera obligatoire pour eux).
La scolarité pourra être suivie au sein de l’école, soit au domicile avec un enseignement distance gratuit, soit en étude, soit dans le cadre d’activités 2S2C (sport, santé, culture, civisme).
Le maximum de souplesse sera donné aux établissements pour qu'ils trouvent la meilleure solution.
Les crèches seront réouvertes. Accueil par groupe de 10 enfants max, et plusieurs groupes accueillis possibles si les locaux le permettent. Il pourrait y avoir des priorités sans qu'il ne dise comment seront fixés ces critères.
b. ENTREPRISES
Le télétravail doit être maintenu partout où c'est possible au moins pendant les 3 prochaines semaines. La pratique des horaires décalés doit être encouragée pour celles et ceux qui ne peuvent pas faire de télétravail : il faut limiter les flux dans les transports.
Conditions de travail : amplification des démarches avec les fédérations professionnelles pour réaliser des guides utiles dans les entreprises. Aujourd'hui 33 guides sont disponibles, il en faut 60 pour couvrir tous les secteurs. Ils seront tous prêts pour le 11 mai. Nouveaux plans d'organisations du travail à faire avec les partenaires sociaux (négociation à partir de ce jeudi). Masque obligatoire s'il n'est pas possible de faire de la distanciation sociale.
Le dispositif de chômage partiel est garanti jusqu'à 1er juin au moins, puis adaptation progressive pour reprise de l'activité.
c. COMMERCES
Réouverture des cafés et restaurants décidée à la fin de la première phase de déconfinement qui débutera le 2 juin.
Réouverture des commerces à partir du 11 mai : tous sauf cafés et restaurants peuvent ouvrir.
Les marchés seront normalement ouvert sauf si le maire ou préfet estime que les gestes barrières ne peuvent pas être respectés.
Respect d'un cahier des charges stricts pour tous les commerces : limitation du nombre de personnes dans le magasin et port du masque grand public (clients et personnel) recommandé quand pas de distanciation physique garantie, un commerçant pourra subordonner l'entrée dans le magasin au port du masque.
Les Centres commerciaux de +40 000m2 pourraient rester fermés (décision du préfet)
d. TRANSPORTS
50% de l'offre de transport sera disponible le 11 mai en IDF.
Il faudra faire baisser la demande (recours au télétravail + horaires différées + utiliser les transports en heure de pointe uniquement si on a un travail).
Masque obligatoire dans tous les transports. Il faudra respecter les gestes barrières dans les transports : on va limiter les accès aux métros par exemple. Les bus scolaires vont circuler avec la règle d'un siège sur deux. Port du masque dans les taxis et VTC.
Pour les transports interdépartementaux : limités aux déplacements impérieux pour motif familial. Il est déconseillé de partir le weekend de l'ascension.
e. PERSONNES AGEES
Limiter les contacts et sorties, sur un principe de confiance et responsabilité. Pas d'attestation de sortie, mais les plus fragiles devront être patientes. Les visites privées doivent être entourées de précaution.
f. VIE SOCIALE
On circulera sans attestation sauf pour les déplacements à +100km du domicile
Possible de pratiquer des activités de plein air à +1km, mais pas de sport collectif, de contact, ou en lieu couvert.
Les jardins ne pourront réouvrir que dans les départements « verts ».
Les plages sont inaccessibles jusqu'au 1er juin.
Les bibliothèques, petits musés et médiathèques pourront réouvrir le 11 mai. Pas les grands musés, cinéma ou théâtre. Idem pour salle des fêtes et salles polyvalentes, jusqu’au 2 juin.
Les grandes manifestations sportives, culturelles, les salons professionnels de +5000 participants ne pourront se tenir avant septembre. Cela implique notamment qu'il n'y aura pas de reprise pour les saisons sportives 2019-2020.
Lieu de culte : ouvert, en limitant dans la mesure du possible les cérémonies avant le 2 juin.
Les cimetières seront réouvert à partir du 11 mai.
Les mariages seront reportés.
Les rassemblement en lieux publics et privés sont limités à 10 personnes.